Que se passe-t-il quand un réalisateur aussi polémique qu'Oliver Stone réalise un film sur le règne pas encore éteint du plus clownesque des présidents américains, Georges W. Bush ? On en entendait déjà crier au scandale. Il faut dire que le cinéaste adore s'attaquer à son sacro-saint pays, et avec plus ou moins de réussite, il faut le reconnaître. On l'a connu carrément outrancier jusqu'à l'hystérie avec Tueurs Nés, et, même si les présidents US, ça le connaît (JFK et Nixon), un esprit sage est en droit de se demander s'il est bien nécessaire de confier ce projet épineux au trublion Stone.
Dans la famille Bush, je voudrais…
Alors, ce W ? Le diable en personne ? Non, nous répond le réalisateur. Celui-ci s'appuie sur une galerie de sosies plus ou moins remarquables (dans laquelle on retiendra surtout Josh Brolin dans le rôle titre et Richard Dreyffuss dans la peau d'un Dick Cheney maléfique) pour décrire un président qui n'en est pas vraiment un. L'œuvre démarre sur une réunion de l'administration Bush Jr., où d'illustres personnages comme Condoleeza Rice, Donald Rumsfeld ou Karl Rove parlent communication. Dick Cheney, assis dans un coin sombre de la pièce, semble régner en secret, tandis que le Président Bush approuve plus ou moins. A partir de là, plusieurs flash-backs, qui arrivent parfois comme des cheveux sur la soupe, dévoilent le jeune Georges, ses prises de bec avec son politicien de père, son alcoolisme, sa foi, sa beauferie, ses bretzels. Bon, certes, on n'apprend pas grand-chose. Pourtant, le point de vue qui nous est proposé bouscule le spectateur dans ses confortables convictions.
Une guerre d'irresponsables
Car Bush Jr. n'est pas plus bête que l'Américain moyen, comme on aimerait le croire. Il est juste un fils de, complexé par son ancien Président de père, qui vise le sommet de l'Etat pour impressionner. Il est ce petit garçon qui veut botter les fesses de Sadam parce que celui-ci "a voulut tuer son père", comme il le dit si bien. On en est là. Pendant que l'administration se frotte les mains en pensant pétrole, ce pauvre bougre de W ne se pose même pas la question de sa légitimité au pouvoir. Sans réelles convictions, si ce n'est religieuses, il a accédé au trône sans vraiment se poser la question de ce qu'il représentait. C'est en cela que Stone fait fort : au lieu de tirer sur ce qui est probablement la plus grosse ambulance de ce début de 21e siècle, il dresse un portrait pathétique d'une situation catastrophique dont les causes sont absolument dérisoires. Et en cela, il ne tombe ni dans le piège de la lapidation, ni dans celui de la réhabilitation (encore heureux) ou de la démagogie Michael Moorienne.
7,5/10
Le pari n'était pas gagné d'avance. Stone regagne pourtant ses galons d'excellent chroniqueur d'une Amérique malade. On en ressort franchement amer.